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Portrait de Joan Mitchell

14 avril 2023

Artiste-peintre et graveuse, figure marquante du mouvement expressionniste abstrait américain, Joan Mitchell est née en 1925 à Chicago. Sa carrière s’est étendue sur plus de quatre décennies, de sa première exposition personnelle professionnelle à New York en 1952 jusqu’à sa mort en France en 1992. Elle fut la bien-aimée de Jean Paul Riopelle de 1955 à 1979.

Recherche et rédaction: Isabelle Desaulniers

Joan Mitchell a étudié à la School of the Art Institute à Chicago, avant de s’installer à New York en 1947. La jeune femme s’est rapidement intégrée à la scène artistique en plein essor de l’époque. «Influencée par Vincent Van Gogh, Paul Cézanne, Vassily Kandinsky et Claude Monet, Mitchell a donné naissance à une œuvre abstraite en prise avec la nature et les couleurs, mais aussi avec les sentiments et les émotions» (Beaux Arts Magazine, octobre 2022). Inspirée par son amour des paysages et de la poésie, avec une énergie à la fois sensuelle et furieuse, elle aimait peindre sur des toiles de grande dimension.

Aux côtés de Jackson Pollock et Willem de Kooning, elle incarne l’art expressionniste américain des années 1950–1960. En 1951, l’artiste est incluse dans l’exposition «Ninth Street Show» à New York, considérée comme un moment déterminant dans l’histoire de l’art américain.

En 1955, Joan Mitchell passe une partie de l’été à Paris où elle rencontre Jean Paul Riopelle dans un café de Saint-Germain-des-Prés. Leur relation amoureuse et passionnée, parfois agitée, durera plus de 20 ans. Ils formeront, jusqu’à leur rupture en 1979, un couple d’artistes souvent influencés l’un par l’autre et dont les œuvres ont marqué leur époque.

«Ces deux artistes ont développé une pratique d’atelier et un corpus bien distinctifs tout en engageant un dialogue nourri autour de l’abstraction. Leurs goûts pour l’héritage impressionniste, la nature et une forme de provocation les ont certainement rapprochés. Leur conception de la peinture et leurs méthodes de travail, profondément singulières, ont pourtant été complètement façonnées par leur relation sentimentale» 
(Source: Musée national des beaux-arts du Québec, mnbaq.org, Mitchell/Riopelle Un couple dans la démesure, 2018).

Joan Mitchell s’installera définitivement en France en 1959, vivant et travaillant d’abord à Paris, puis à Vétheuil en 1968, où elle peint sans interruption jusqu’à son décès en 1992. À l’annonce de sa mort, Jean Paul Riopelle entreprend L’Hommage à Rosa Luxemburg, monumental triptyque réalisé d’un seul élan, une longue fresque se déployant en 30 tableaux dont les signes et les codes relatent, en filigrane, sa rencontre avec son ancienne compagne. C’est cette œuvre qui a servi de canevas à Robert Lepage pour le spectacle Le Projet Riopelle.

«Le titre de l’œuvre provient de l’anecdote voulant que, durant leurs années de vie commune, Riopelle ait appelé Mitchell sa “Rosa Malheur”, faisant référence à Rosa Bonheur (1822-1899), une virtuose de la peinture animalière. Rosa est également le prénom d’une militante du parti communiste allemand, célèbre pour ses lettres de prison codées, à savoir Rosa Luxemburg»* 

«Pendant des années, j’ai l’impression que les œuvres que Jean Paul Riopelle et Joan Mitchell réalisaient étaient presque des cocréations. Les points de contact sont tellement grands, que parfois on se demande s’ils n’ont pas travaillé sur les tableaux de l’autre. Je me souviens d’une exposition Mitchell/Riopelle de Simon Blais, il y a quelques années, où c’était souvent difficile de distinguer quelles œuvres étaient de l’un ou de l’autre. Je pense qu’ils ont eu une espèce de symbiose créative pendant quelques années, et ça expliquerait le côté maniaque de Riopelle lorsqu’il a réalisé L’Hommage à Rosa Luxemburg. C’était comme si une partie de lui disparaissait quand Joan Mitchell est décédée», commente Jean-François Bélisle, directeur général et conservateur en chef du Musée d’art de Joliette.

L’une des plus importantes peintres américaines de l’après-guerre et l’une des rares femmes à s’imposer dans le monde de l’art abstrait, alors dominé par les hommes, Joan Mitchell est la première à avoir une exposition personnelle au Musée d’art moderne de la ville de Paris en 1982. Aujourd’hui, on peut admirer ses œuvres dans les plus grands musées d’art moderne à travers le monde. 

*(Source: Musée national des beaux-arts du Québec, Jean Paul Riopelle L’Hommage à Rosa Luxemburg, 2016).

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