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Le Cid pour les nul·le·s

28 février 2023

Dans la pièce Manikanetish, les élèves de Yammie montent la pièce Le Cid de Corneille. Pour ceux et celles qui auraient besoin de se rafraichir la mémoire, nous vous avons préparé un petit guide «Le Cid pour les nul·le·s»!

«À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire». 

Vous avez probablement déjà entendu ce proverbe. Saviez-vous qu’il est extrait de la pièce de théâtre Le Cid de Corneille? Écrite en vers (principalement des alexandrins) par Pierre Corneille et présentée pour la première fois en janvier 1637 au théâtre du Marais, à Paris, on la classe souvent dans le style de la tragi-comédie, qui mêle, comme son nom l’indique, plusieurs styles théâtraux. Les personnages y sont héroïques et leurs sentiments, nobles. Toutefois, le dénouement est heureux, ce qui n’est normalement pas le cas dans une tragédie.

Qui était Corneille?

Né le 6 juin 1606 à Rouen, Pierre Corneille est considéré, avec Molière et Racine, comme l’un des trois plus grands dramaturges français. Il a fait des études en droit et aurait pu devenir avocat, mais il a choisi l’écriture. Son œuvre est extrêmement variée. D’abord inspiré par la comédie, il glissera peu à peu vers la tragédie, avec, entre-temps, la création en 1637 de son chef-d'œuvre Le Cid, une tragi-comédie qui reçoit un accueil triomphal et dont le succès dépasse les frontières de la France: la pièce a été jouée à Québec en 1646, dix ans seulement après sa création à Paris. En 1647, désormais reconnu, il est élu à l’Académie française, une assemblée de personnes qui veillent à ce que la langue française soit la plus éloquente possible et qu’elle ne meure jamais. En 1659, après des années plus difficiles, Corneille renoue avec le théâtre, mais il subit la concurrence d’un jeune dramaturge plus à la mode : Racine. Il décède à 78 ans, à Paris, en laissant une œuvre qui reste l’une des plus considérables de l’âge classique.

Portrait de Corneille, par Charles Le Brun.

De quoi parle Le Cid?

La pièce se déroule en Espagne dans le royaume de Castille à Séville. Don Diègue et Don Gomès (comte de Gormas) approuvent le mariage de leurs enfants, Rodrigue et Chimène. Mais le comte, jaloux de se voir préférer le vieux Don Diègue au poste de gouverneur du prince de Castille, lui assène une gifle (un «soufflet» dans le langage de l’époque). La querelle des deux vieillards rejaillit sur la destinée de leurs enfants. Don Diègue, trop âgé pour se faire justice, remet sa riposte entre les mains de son fils. Déchiré entre son amour et son devoir, Rodrigue (dit «le Cid») ne sait que faire. S’il obéit à son devoir, il doit tuer le père de sa promise et la perdre; s’il refuse la vengeance au profit de l’amour, il manque à ses obligations et portera toute sa vie la marque de la lâcheté.

Le dilemme est cruel… il est «cornélien»!

L’œuvre de Corneille, où plusieurs personnages sont forcés de choisir entre leur devoir et leurs sentiments, a offert à la langue française un nouvel adjectif: cornélien. On l’emploie par exemple pour caractériser un dilemme entre deux valeurs tout aussi importantes l’une que l’autre. On parle alors d’un dilemme ou d’un choix cornélien.

Ph. Jeanbor ©Archives Larbor

Extrait du monologue de Rodrigue
(Acte I, scène 6)

Ô Dieu, l’étrange peine!

En cet affront mon père est l’offensé,

Et l’offenseur le père de Chimène!

Que je sens de rudes combats!

Contre mon propre honneur mon amour s’intéresse:

Il faut venger un père, et perdre une maîtresse:

L’un m’anime le cœur, l’autre retient mon bras.

Réduit au triste choix ou de trahir ma flamme,

Ou de vivre en infâme,

Des deux côtés mon mal est infini.

Ô Dieu, l’étrange peine!

Faut-il laisser un affront impuni?

Faut-il punir le père de Chimène?

Théâtre du Marais. Monologue de Don Rodrigue dans le Cid de Corneille (Acte I, scène 6). Estampe de Adrien Marie (1870). Source: BnF/ Gallica

Les personnages du Cid qu’interprètent les étudiant·e·s de Manikatenish

Rodrigue

Fils de Don Diègue, amant de Chimène. Il est le Cid.

Chimène

Fille de Don Gomès, maîtresse de Don Sanche, amante de Don Rodrigue.

Don Gomès

Comte de Gormas, père de Chimène.

Don Diègue

Père de Don Rodrigue.

Doña Urraque

Enfant de Don Fernand (Infante de Castille), aime secrètement Don Rodrigue.

Don Fernand

Premier Roi de Castille.

Don Sanche

Amoureux de Chimène.

Elvire

Gouvernante de Chimène.

Mais c’est quoi un «cid»?

Le héros de la tragédie de Corneille est inspiré d’un seigneur espagnol qui a vécu de 1043 à 1099, Rodrigo Diaz de Bivar surnommé le Cid Campeador (le «seigneur qui gagne les batailles»). Le mot « cid » vient de l’arabe sayyid, qui signifie «seigneur» ou « maître ».

Et un alexandrin?

Le Cid est une pièce de théâtre en alexandrins essentiellement, c’est-à-dire un vers composé de douze pieds, c’est-à-dire douze syllabes. Dans la langue française: un pied correspond à une syllabe. L’alexandrin est une forme rare et recherchée de poésie. Beaucoup pensent que l’alexandrin est une référence au roi Alexandre le Grand, l’un des plus grands personnages de l’Antiquité. D’autres prétendent que les vers alexandrins ont pris leur dénomination d’un poète nommé Alexandre Paris.

Pour terminer, quelques autres extraits célèbres!

«Cette obscure clarté qui tombe des étoiles»

«Rodrigue as-tu du cœur?»

«Je suis jeune il est vrai, mais aux âmes bien nées / La valeur n’attend point le nombre des années»

«Va, je ne te hais point»

«Nous partîmes cinq cents, mais par un prompt renfort / Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port»

«Ô rage! ô désespoir! ô vieillesse ennemie! / N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie»

«Va, cours, vole, et nous venge»

«Qu’il meure pour mon père, et non pour la patrie»

«Son sang sur la poussière écrivait mon devoir»