Arnold Wesker

Arnold Wesker est non seulement l’un des plus grands dramaturges du XXe siècle, il est également l’un de ceux qui ont bousculé les traditions du théâtre britannique dès la fin des années 1950 et qui ont contribué à le transformer. Un homme qui, au cours des cinquante dernières années, a marché sur le fil ténu de la provocation et de la controverse, laissant derrière lui une œuvre considérable, dense, riche et essentielle. Mais à quel moment débute donc l’histoire d’Arnold Wesker? Avec sa première pièce, The Kitchen, écrite en 1956? Avec Roots qui lui vaudra l’Evening Standard Award de l’auteur le plus prometteur en 1959? Avec cette campagne pour le désarmement nucléaire, en 1961, au cours de laquelle il est emprisonné pendant un mois, en compagnie de Bertrand Russell et d’autres membres du «Comité des 100»? Avec la création en 1961 d’un mouvement culturel, le Centre 42, destiné à promouvoir les arts auprès d’un public populaire? Arnold Wesker est l’auteur de plus de 40 pièces de théâtre, dont la plupart ont été traduites en près de 20 langues et jouées partout dans le monde, 4 recueils de nouvelles, 2 essais, un livre pour enfants, plusieurs recueils de poésie, une autobiographie et un roman, Honey, publié en 2005. Né à Londres en 1932, d'un père juif ukrainien et d'une mère hongroise d’origine juive également, Arnold Wesker s'engage dans la Royal Air Force à la fin de ses études. Il relate d’ailleurs cette expérience dans sa pièce Chips with Everything, écrite et créée en 1962 au Vaudeville Theatre, à Londres. Cette pièce est alors élue «meilleure pièce de l’année». La Compagnie Jean Duceppe l’a d’ailleurs produite lors de la saison 1977-1978 sous le titre Des frites, des frites, des frites. En 1958, après avoir pratiqué divers métiers, dont ceux de plombier, menuisier, vendeur de livres ou encore chef pâtissier au restaurant Le Rallye, boulevard des Capucines, à Paris, il reçoit une bourse du Conseil des Arts de la Grande-Bretagne. Il entreprend alors des études cinématographiques à la London School of Film Technique, lui qui rêve de devenir réalisateur, tout en poursuivant son travail de dramaturge. C’est également à cette époque qu’il découvre la pièce de John Osborne, Look back in Anger, écrite en 1956, œuvre mythique et marquante dans l’histoire du théâtre anglais. Subjugué, il écrit alors Chicken Soup with Barley en six semaines. À la fois autobiographique et réaliste, son théâtre est résolument engagé et l’ensemble de son œuvre est inséparable de ses prises de position politiques et éthiques. Sa première pièce, The Kitchen, date de 1956 pour la première ébauche et est finalement présentée en 1961. L’univers impitoyable qu’il y dépeint sera encore évoqué dans sa célèbre trilogie Chicken Soup with Barley, Roots et I'm Talking About Jerusalem, jouée séparément d’abord au Belgrade Theatre, entre 1958 et 1960, puis dans son intégralité au Royal Court Theatre. Cette saga raconte l'épopée d'une famille juive, depuis la guerre civile d'Espagne jusqu'à l'insurrection hongroise de 1956. Pour Wesker, il s’agit en même temps de comprendre d’où il vient et de sentir l’impact du théâtre sur la société. À partir des années 1970, après l’expérience du Centre 42 qui aura duré une décennie, les pièces de Wesker deviennent soit très intimes, soit à grand déploiement. Dans les deux cas elles ont en commun la désillusion, le doute et la douleur. Parmi les pièces intimes, on compte Caritas: A Play in Two Acts(1981) inspirée de la vie d’un ermite ayant vécu au Moyen Âge, Annie Wobler (1983), trilogie de monologues écrite pour et avec la comédienne Nicole MacAuliffe, The Mistress, Men Die Women Surviveet Wild Spring. Parmi les pièces à grand déploiement, Chips with Everything (1962), The Wedding Feast(1974) et Shylock (1980), adaptation du Marchand de Venise de Shakespeare. La triste expérience de la production de Shylock, au cours de laquelle Zero Mostel mourut à la suite de la première représentation, l’incita d’ailleurs à écrire un livre intitulé Birth of Shylock and the Death of Zero Mostel, paru en 1997. Parmi ses autres pièces, notons entre autres Their Very Own and Golden City (1966), The Friends(1970), Wild Spring (publiée dans Wild Spring and Other Plays en 1994). Denial (Le Déni dans la traduction de Geneviève Lefebvre) est créée au Bristol Old Vic le 16 mai 2000 et est adaptée pour le cinéma en 2004. À propos de cette pièce, rappelons que Stephen Daldry, alors directeur artistique du Royal Court Theatre et lui-même grand innovateur, fut parmi les premiers à apprécier les motifs ayant mené Wesker à écrire une telle pièce. Après en avoir lu la première ébauche, il confia à l’auteur que «sans aucun doute, cette pièce propose des scènes parmi les plus émouvantes qu’il m’ait été donné de lire.» En 1994, son livre As Much as I Dare: An Autobiography, dans lequel il raconte ses années de jeunesse, est publié. Wesker est également l’auteur de scénarios de films tels que Lady Othello et The Diary of Jane Somers, adaptation d’un roman de Doris Lessing. Parmi ses œuvres les plus récentes, citons Barabbas, une pièce en un acte pour la BBC, Longitude, une adaptation du roman de Dava Sobel, produite au Greenwich Theatre en 2005, The Rocking Horse, une pièce pour la radio retransmise le 2 décembre 2007 sur les ondes de la BBC dans le cadre de son 75e anniversaire et Groupie, écrite également pour la radio de la BBC en 2001, et actuellement présentée dans le West End de Londres. Sans oublier Grief, un livret d’opéra pour une seule chanteuse. Cette œuvre a été créée et mise en scène par l’auteur au Suntory Hall de Tokyo, le 8 avril dernier. Au printemps 2008, trois livres d’Arnold Wesker ont été publiés: Wesker’s Love Plays, Wesker’s Monologues et All Things Tire of Themselves. Arnold Wesker est membre de la Royal Society of Literature. En 1999, à Valdez en Alaska, il reçoit des mains d’Edward Albee le Last Frontier Lifetime Achievement Award pour son exceptionnelle contribution au théâtre. En 2006, il est fait chevalier. Arnold Wesker vit actuellement au pays de Galles.